Transfert de Messi et rapport du GIEC

10 août 2021

Transfert de Messi et rapport du GIEC

Je peux le dire maintenant que l’Euro est passé : le monde du football me laisse parfaitement indifférent. En revanche, militant écologiste et élu local, les rapports du GIEC devraient faire partie des grandes lignes de mes préoccupations. À mon échelle, j’essaye en effet d’inscrire mes actions de citoyen et de mandataire en cohérence avec les constats scientifiques sur les dérèglements climatiques. C’est, j’en conviens, d’une banalité navrante et pourtant…

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Et pourtant, comme vous sans doute, je me suis laissé aller à feuilleter le compte rendu de la conférence de presse d’une star argentine du Barça tout en laissant de côté les synthèses du rapport du GIEC. Cet aveu coupable ne bouleversera, j’en suis sûr, ni la marche du monde ni la vie d’aucun d’entre vous mais s’il est symptomatique de quelque chose qui dépasse mon insipide cas personnel, peut-être serait-il intéressant d’en creuser les motifs.

Photo by Lukas Blazek on Unsplash (CCO)

Six-zéro

Si je devais m’en justifier, je crois que je motiverais ce péché véniel en arguant que j’attendais, comme vous, dans ce monologue footballistique quelque chose qui s’apparente à un tournant significatif sur le plan sociétal. Quelque chose comme l’attention portée à la santé mentale des athlètes mise au-devant de la scène par Simone Biles,  les questions de genre au centre des tenues des gymnastes allemandes, les genoux à terre et autres stades arc-en-ciel au cœur de la Bavière. Ces récits qui démontrent chacun à leur manière, qu’il est impossible de séparer l’homme de l’artiste, fusse-t-il artiste du ballon rond.

Un récit

Mais puisqu’il faut se résoudre à ne trouver aucun message profond derrière le transfert de Messi alors que le rapport du GIEC a de quoi bouleverser nos vies un peu plus longtemps qu’un mercato, résolvons-nous à admettre que toute la différence réside dans la qualité de la mise en récit. Oh rassurez-vous, je ne prétends pas inventer le fil à couper le beurre en affirmant ça. Cela fait bien longtemps qu’on a démontré qu’un millionnaire qui pleure au Camp Nou fait une plus belle histoire qu’une volée d’experts qui alignent leurs chiffres accablants.

Le football réussit là où une jeune suédoise, un centenaire inspirant et un ours polaire échouent parce qu’il offre des émotions à la pelle, fierté, colère, indignation, montée d’adrénaline avec une garantie que ne saura jamais s’arroger le GIEC : celle que nos vies ne sont pas en jeux! C’est la garantie que « c’est pour du faux » qui nous amène à insulter copieusement l’arbitre, l’équipe adverse, le commentateur et l’entraineur. C’est la déconnexion du football de nos réalités qui crée le confort de ses récits. C’est d’ailleurs sans doute cela qui crée un tel malaise avec les milliers de morts dans la construction des stades au Qatar, cette évidence difficile à nier que « ce n’est pas pour du faux », que les millions de dollars en jeu pèsent plus que la vie des ouvriers népalais, kenyans ou philippins.  

« Khalifa Stadium, Doha Qatar » by Makz is licensed under CC BY-NC 2.0

Conclusion

Aucun expert du GIEC ne sera assez puissant pour enrayer notre penchant à adhérer aux belles histoires, celles du Barça, de la Squadra ou des Diables Rouges. Le faut-il ? Je n’en sais rien. Quoi qu’il en soit, le football a sans doute encore de beaux jours devant lui et les communicants de tous les partis verts, toutes les ONG environnementales ont encore du pain sur la planche. Mais s’il fallait ne retirer qu’une conclusion de notre rapport à leurs histoires, sans doute serait-ce cela : le transfert de Messi ne s’inscrit pas dans une réalité moins tangible que les rapports du GIEC. Il n’y a sans doute qu’un joueur professionnel, qu’un acteur en costume mauve et bleu pour monter sur scène, verser une larme et nous rassurer en nous donnant à penser que « c’est pour du faux ».  

Photo by Fayas S on Unsplash

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Commentaires

Jacques Jamoye
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Les moyens financiers engagés autour de ce garçon sont ahurissants. Mais ce qui, à mes yeux, est parfaitement incompréhensible est l idolâtrie imbécile des '' supporters''